Quand bébé est en route, on est toujours un peu (ou très) curieux de savoir si on attend une fille ou un garçon. On trouve beaucoup de « recettes de grand-mère » que l’on prend au second degré, avec le sourire, pour le fun, et puis on trouve aussi des théories qui sont présentées comme scientifiques, sous entendu, c’est du sérieux. Je n’avais pas prévu d’écrire cet article, mais comme je suis encore une fois tombée sur des choses fausses, j’ai décidé de vous écrire quelques mots là-dessus, et notamment parler des théories des J- et « plus de rapports entraînent plus de spermatozoïdes X, donc de filles ».
Je classe dans la rubrique GROSSESSE, même si je vois que ces croyances sont également citées avant la conception du bébé, quand on veut « choisir » le sexe de son enfant, ou du moins favoriser les choses. Beaucoup de femmes se compliquent la vie avec ces méthodes alors que cela ne changera rien au résultat final, ça sera toujours en gros du 50-50.
En tout cas fin du suspens, je peux vous le dire dès le début, les seules méthodes vraiment scientifiques et fiables pour connaitre le sexe de votre futur enfant sont : réaliser un caryotype foetal, la détection de l’Y foetal dans le sang maternel, et plus tard, l’échographie (même si dans notre entourage, on connait tous au moins quelqu’un qui a eu l’inverse de ce qui avait été dit à l’échographie ^^).
Aussi, la seule méthode scientifique fiable pour choisir le sexe de son enfant est le diagnostique préimplantatoire, interdit en UE.
L’histoire des J-, basée sur les propriétés des spermatozoïdes
La théorie
La théorie découle des travaux de Shettles. Selon cette théorie, la date des rapports prédit le sexe du futur enfant de façon assez fiable, si bien qu’on généralise en ne modérant pas l’affirmation. On dit : un rapport éloigné de l’ovulation fait des filles (genre J-4, J-5 etc…), un rapport proche de l’ovulation fait un garçon (JJ, ou J-1 à 3). Tout ça découlerait du fait que, selon Shettles, les spermatozoïdes X (ceux qui feront des filles) seraient plus gros donc plus lents et résistants, et que les spermatozoïdes Y (futurs garçons) seraient plus petits donc plus rapides, mais moins résistants.
Analyse de la théorie
Je ne sais pas pourquoi cette théorie perdure encore en France, on lit ça sur des sites ou des forums. Peut être parce que les études qui démontrent le contraire sont en anglais ? Je pense que cette barrière de la langue contribue au fait que cette croyance perdure encore chez nous. Cela ne doit pas être la seule explication, il y a aussi cette inertie que l’on observe de façon générale avec de fausses infos qui perdurent dans le temps (par exemple en éducation, certains croient toujours que faire des punitions ou mettre des fessées sont efficaces). On les voit partout, on se dit que c’est vrai …
Bref donc cela découle des travaux de Landrum Shettles, il y a environ une 40aine d’années, à une époque où les techniques de labo et de biologie étaient moins bien avancées qu’à notre époque ! Pour simplifier la suite, je vais écrire X pour spermatozoïdes X, et Y pour spermatozoïdes Y.
1/ les X et Y auraient une taille et forme différente : Tout part de là. Pourtant, il y a eu de nombreuses études pour étudier les différences physiques entre les X et les Y. La seule vraie petite différence est d’ordre génétique : les X ont un petit bout de chromosome en plus, absent des Y, ils portent environ 2.8% de matériel génétique supplémentaire. N’oublions pas que les 22 autres chromosomes contenus dans le spermatozoïde X ou Y eux sont tous très proches en terme de taille …
les chercheurs d’aujourd’hui (qui ont des équipement plus performant et dont les techniques ont également considérablement évoluées depuis les recherches de Shettles) n’ont pas trouvé de différences de forme et de taille entre les X et les Y : ni au niveau de la tête, de la largeur, de la longueur de la queue du spermatozoïdes, etc … Ces conclusions ont été à la fois faite après analyse de sperme normal ou présentant des pathologies. Un exemple d’étude : http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16412741 .
Pourtant, shettles avait observé à l’époque des spermatozoïdes considérablement différents ! Pourquoi donc ? La théorie la plus plausible qui explique cela et que depuis ses travaux, des techniques bien plus avancées ont été développées. Les chercheurs ont depuis découvert ce que Shettles prenait pour des X ou des Y : il s’agirait en fait de spermatozoïdes ayant subit ou non la capacitation, qui a lieu après l’éjaculation. En effet, pour pouvoir féconder l’oeuf, les spermatozoïdes doivent perdre des éléments à leur extrémité. Ce phénomène n’était pas encore connu au moment où Shettles avait fait ses observations…
2/ les X et Y nageraient à une vitesse différente : Shettles ayant décidé qu’au vu de leur forme, les X sont plus gros, les Y plus petits, les X devaient nager moins vite, alors que les Y devaient être plus rapides. L’expérience qui lui a permis d’arriver à cette conclusion a été très contestée, et d’ailleurs plusieurs autres chercheurs ont échoués à reproduire ses résultats … Ce qui ne semble pas étonnant. J’ai trouvé sur un site un petit exemple qui illustre cela et qui vous parlera : regardons les athlètes, qui ont des tailles et des gabarits différents. Les plus petits ne sont pas forcément les plus rapides. Au contraire, être plus grand peut procurer un avantage, … comme un inconvénient.
3/ Les X vivraient plus longtemps que les Y : encore faux, c’est juste une hypothèse que Shettles a faite en pensant que plus gros = plus résistant, sachant que de base il avait mal interprété la présence de spermatozoïdes plus gros en pensant que c’était des X (cf paragraphe 1/ au-dessus). D’ailleurs une étude récente (comparée aux travaux de Shettles) démontre l’inverse, que les Y vivraient plus longtemps : http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1046/j.1439-0272.2001.00427.x/full
si vous voulez des stats, Shettles, papa de ces théories, avait obtenu avec 41 couples 85% de naissance de garçons pour une fécondation autour de l’ovulation,
Guerrero (1974) obtient le contraire : sur 900 couples, 56% de naissances de filles pour une fécondation autour de l’ovulation,
Harlap (1979) : 49,3 % de garçons dans les même conditions ….
France (en 1984) : 64% de filles sur 33 grossesses
Simcock (en 1985) : trouve 57% de filles sur 73 grossesses.
En résumé
On n’a toujours pas démontré que les X ou Y sont plus rapides ou fragiles., etc … De plus, rien ne prouve que les premiers spermatozoïdes arrivés à l’ovule soient ceux qui le fécondent. D’ailleurs, c’est plutôt l’inverse qui se produit : les premiers arrivés sont soient morts soient incapables de féconder l’ovule !!! Quand on sait qu’il y a environ 140 à 160 garçons conçus pour 100 filles, cela ne tient encore une fois pas la route ! Ainsi, personne en observant du sperme au microscope n’est capable de différencier les X des Y. D’ailleurs, si c’était possible, on n’aurait pas besoin d’utiliser la lourde technique du diagnostique préimplantatoire pour différencier les uns des autres ….
L’histoire de la fréquence des rapports
la théorie
Je vais faire court : selon cette théorie, plus on a des rapports fréquents, plus on a de chance de faire une fille, car cela réduit le nombre de Y.
Pourquoi c’est faux ?
Les hommes produisent autant de X que de Y !!!!! Petite leçon de biologie : pour vous expliquer le principe, il faut partir de la base. Les hommes (XY) ont des cellules dont le noyau contient 46 chromosomes (sur le schéma plus bas, ce sont celles notées « 2n« ). Ces chromosomes sont par paire (cela fait donc 23 paires). La paire de chromosomes dit sexuels sont plus connus sous le nom de XY (pour les hommes). Les gamètes (notés « n » sur le schéma) eux ne contiennent que 23 chromosomes (donc la moitié !).
La production des spermatozoïdes (spermatogenèse, via la méiose) se fait en passant de cellules contenant 46 chromosomes à 23 (comme ça quand le spermatozoïde fusionne avec l’ovule qui en a 23 aussi, paf, on retombe sur les 46 chromosomes !!!). Chaque cellule « mère » se divise en deux : chaque paire de chromosome se sépare et part dans l’une des deux cellules filles. Il va en découler une cellule fille avec un X, et une cellule fille avec un Y. Vous comprenez donc pourquoi il est impossible qu’un homme produise plus de X que de Y !! c’est toujours produit à part égale puisque cela résulte de la division d’une cellule XY !
J’ai beaucoup résumé, voici un petit schéma si cela peut aider à mieux comprendre (désolée, je n’ai pas trouvé la source pour cette image) :
J’espère que cet article aidera certaines femmes à ne plus se prendre a tête avec ses théories 🙂
source image de couverture : http://atlas.eshre.eu/es/14550068476800020
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